OIM : #FasoNooma pour prévenir la migration irrégulière et promouvoir la réintégration des anciens migrants

Publié le mardi 26 février 2019 à 19h39min

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OIM : #FasoNooma pour prévenir la migration irrégulière et promouvoir la réintégration des anciens migrants

La région du Centre-Est est la plus affectée par le phénomène de la migration. Sur 1013 migrants burkinabè en situation de retour volontaire en 2017, 56% sont originaires de cette région. En 2018, 62% des 719 migrants assistés par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) pour regagner leur Faso natal sont du Centre-Est. Exploitation, abus et même plusieurs décès, notamment dans la Méditerranée centrale sont le lot des migrants irréguliers exposés à divers risques durant leur parcours. D’où la nécessité de promouvoir une migration sûre et informée. C’est dans ce cadre que l’OIM a lancé, le 25 février 2019, à Tenkodogo, la 2e édition de la campagne de sensibilisation #FasoNooma sur les risques et les alternatives à la migration irrégulière.

Prestations théâtrales, projections de films, focus groupes, témoignages d’anciens migrants, discussions avec les communautés sur les risques liés à la migration irrégulière et les potentialités à exploiter au niveau local. Ce sont les grands axes de la campagne #FasoNooma 2019. A travers ces activités, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) entend contribuer à la prévention de la migration irrégulière et à la réintégration durable pour les Burkinabè de retour.

« Le choix de la région du Centre-Est n’est pas fortuit. Du nombre de retours, il ressort que le Centre-Est est la première région d’émigration. Raison pour laquelle l’OIM a jugé utile de travailler sur des programmes de prévention en ciblant non seulement les jeunes qui sont de potentiels candidats à l’immigration pour les informer sur les risques liés à la migration, mais surtout pour mettre l’accent sur les opportunités de réussite qu’il y a dans la région. En même temps, nous travaillons avec les migrants, les Burkinabè qui rentrent volontairement et que nous aidons à avoir des opportunités d’emplois professionnels dans leur région d’origine pour éviter qu’ils retombent ou qu’ils retentent à nouveau cette migration irrégulière qui n’est pas sans risques notamment les abus, l’exploitation… Donc, pour nous, il était important de commencer cette campagne qui est à sa 2e édition pour sensibiliser davantage les jeunes qu’il y a des opportunités, mais également les communautés », a expliqué Abibatou Wane, chef de mission de l’OIM-Burkina. La campagne 2019 se veut une continuité de la première édition.

Abibatou Wane

Mais, « cette fois-ci, nous avons trouvé un nom #FasoNooma qui veut dire que le Burkina est bon. Donc, nous allons mettre l’accent sur la région parce qu’elle regorge d’énormes potentialités ; on peut trouver des alternatives pour ces jeunes et leur éviter ainsi la migration », a-t-elle poursuivi.

Cette campagne s’étendra jusqu’au 18 décembre prochain correspondant à la Journée mondiale des migrants. Tout au long de la campagne, l’OIM et ses partenaires sillonneront des villages pour diffuser des films de sensibilisation, présenter des pièces de théâtre, discuter avec les communautés pour passer des messages adaptés. « Les migrants eux-mêmes vont témoigner de leurs parcours migratoires, ceux qui ont réussi. Nous voulons montrer qu’il est possible de réussir au Burkina », a précisé Abibatou Wane.

Patrice, un ancien migrant

Patrice Wendega est actuellement ferrailleur de bâtiments à Tenkodogo. Pourtant, il a passé de nombreuses années à l’aventure, notamment en Libye. « Quand je regardais la représentation théâtrale, je vivais ça en réalité parce que j’ai déjà vécu tout ça. Ils ont choisi de parler de certaines choses seulement, sinon c’est plus fort que ça », a-t-il confié après la prestation de la troupe de théâtre Watinoma.

« J’ai quitté le Burkina en février 2012 pour Niamey sans savoir où je partais. C’est de Niamey que j’ai pris la décision de continuer en Libye. Je me suis limité à la Libye précisément à Tripoli parce que mon argent était fini. Donc, je me suis lancé dans les affaires comme passeur. Par mois, je pouvais avoir 1000 passagers et je travaillais avec un Ivoirien qui faisait venir le convoi. A un moment donné, j’ai décidé d’arrêter parce qu’en 2016, il y a eu un naufrage d’un navire et beaucoup de nos compatriotes ont péri en mer. J’ai aussi fait la prison là-bas avec des blessures », a-t-il raconté.

Avant de lancer aux potentiels candidats : « On ne peut pas empêcher nos frères d’aller à l’aventure mais avant de se lancer, il faut suivre les procédures, avoir tous les documents nécessaires sinon, il y a plus de souffrances que de gain. On peut même perdre la vie ». Aujourd’hui, il est membre de l’Association des immigrés réintégrés du Boulgou (AIRB) et compte apporter sa modeste contribution à la sensibilisation de ses compatriotes.

Sakinatou Sorgho

Bien que n’ayant jamais migré, Sakinatou Sorgho semble avoir compris le message et s’engage à conseiller ses frères et sœurs à réfléchir par deux fois avant de prendre le chemin de l’aventure. « Grâce à cette pièce de théâtre et au film qu’on a suivi, j’ai compris que si nous nous organisons mieux, nous pouvons réussir même en restant au pays. On n’a pas forcément besoin d’aller vivre ce calvaire-là, revenir avec des blessures et subir toutes sortes d’humiliation », lance-t-elle.

Mieux, elle invite les fils et filles de la région à prioriser l’entreprenariat agricole ou le commerce, car « il y a beaucoup de personnes qui sont parties et qui ne sont jamais revenues. Avec tout ce que nous voyons, nous allons déconseiller nos frères de migrer de façon irrégulière parce qu’il y a plus de souffrance que de richesses à en tirer ».

le Gouverneur Antoine Ouédraogo disposé à soutenir la campagne autant que possible

C’est le gouverneur de la région du Centre-Est, Antoine Ouédraogo, qui a procédé au lancement officiel de la campagne #FasoNooma. Il n’a pas manqué de dire toute sa disponibilité à accompagner cette campagne de lutte contre l’immigration irrégulière. « Même si on ne peut nier les retombées économiques consistantes, force est de constater que ce phénomène comporte beaucoup de risques si bien qu’il est aujourd’hui une véritable préoccupation. La migration irrégulière prive notre région de ses bras valides et de sa jeunesse qui est le fer de lance du développement. Plusieurs familles ont été affectées par la disparition tragique de leurs enfants partis à l’aventure et dont ils n’ont plus de nouvelles », a-t-il confié. Avant d’inviter les nombreux migrants revenus de leur aventure à communiquer davantage sur les réalités du phénomène.

Moussa Diallo
Lefaso.net

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